Estimation de
tableaux anciens

Depuis la préhistoire, l’homme peint. Son environnement, ses activités, ses croyances, son quotidien sont représentés d’abord sur les parois des grottes, puis sur des objets, des murs, et des panneaux de bois. Il nous reste peu d’exemplaires de ces œuvres altérées par le temps ou détruites par les hommes. Aussi, les historiens de l’art font souvent débuter la peinture occidentale par les œuvres de l’artiste italien Cimabue (1240-1302). En effet, son renouvellement de la peinture byzantine en y introduisant un certain degré de naturalisme, influencera toute l’Italie médiévale et fera de lui un précurseur de la Renaissance. En 2019, une petite tempera sur bois, Le Christ moqué, est découverte à Compiègne lors d’un inventaire. Le tableau est identifié comme un élément d’un retable peint par Cimabue, il a été adjugé 19,5 millions d’euros en vente aux enchères, et a été classé Trésor National par le ministère de la Culture.

Poussant toujours plus loin la recherche de naturalisme, la perspective est introduite dans la peinture. Néanmoins, les peintres de la Renaissance représentent des sujets religieux, tirés de la Bible et des textes sur les Saints. Puis à la suite de la redécouverte des textes anciens et des vestiges de l’Antiquité romaine, ils introduisent des sujets mythologiques.

Les premières scènes profanes – représentant le quotidien ou des personnalités – n’apparaissent qu’au début du XVe siècle, dans l’Europe du Nord. Les primitifs flamands même s’ils conservent encore un style gothique, introduisent une part de réalisme et notamment la perspective. Toutefois leur innovation majeure n’est pas tant stylistique que technique, c’est l’introduction de la peinture à l’huile en lieu et place de la tempera. Jan van Eyck (1390-1441) à qui l’on doit le très célèbre tableau Les Époux Arnolfini, a amélioré et rendu accessible une technique préexistante.

Enfin, l’avènement de la toile de lin comme support de la peinture au détriment du panneau de bois, permettra de réaliser des œuvres de grandes tailles. Les artistes vénitiens ont grandement favorisé la diffusion de cette innovation au XVIe siècle en Italie puis au XVIIe siècle dans le nord de l’Europe.

Aussi à partir du XVIe siècle, tous les éléments sont posés. L’innovation technique suivante, à savoir le tube de peinture en étain, provoquera le basculement vers ce que l’on nomme peinture moderne.

Il est rare que les tableaux anciens soient signés de la main de l’artiste. Avant le XVe siècle, les peintres n’apposent pas leur nom en bas des œuvres, d’où les difficultés à être sûr de l’auteur. Si la pratique se généralise au XVIe siècle, on est encore loin de la signature en bas à droite. Il s’agit parfois d’une mention au dos de la toile ou sur le châssis. Le plus souvent les spécialistes ont recours à la stylistique pour attribuer une œuvre à un artiste plutôt qu’à un autre.

De plus, l’histoire de l’art a bien souvent oublié le nom des petits maîtres. À défaut d’identifier une main, on peut déterminer l’ère géographique de production de l’œuvre ainsi que la période – souvent le siècle. Exemples : une École italienne du XVIIe siècle ou une École flamande du XVIe siècle.

Le paysage et la peinture de genre sont plus souvent attribués aux peintres flamands, alors que les scènes mythologiques ou de l’Ancien Testament sont plus souvent l’œuvre des artistes italiens. La peinture française ne s’affranchit d’un style italianisant qu’au XVIIe siècle avec des figures comme Simon Vouet ou Nicolas Poussin. Mais elle connait ses heures de gloire aux XVIIIe et XIXe siècles.

En Europe du Nord, la peinture hollandaise délaisse l’art baroque de la peinture flamande du XVIIe siècle, pour conserver la tradition réaliste des primitifs. Le calvinisme interdisant la peinture dans les églises, les artistes se tournent vers des sujets profanes : paysage, scène de genre, portrait, peinture d’histoire…

Néanmoins, on a fait aux XVIIIe et XIXe siècles, des peintures dans le goût des styles plus anciens. Là, c’est souvent le support qui nous permet de ne pas être trompés par le style.

Plusieurs facteurs entrent en ligne de compte pour estimer la valeur d’un tableau : son ancienneté et son état de conservation, mais aussi son sujet, la technicité du travail de l’auteur et la qualité esthétique de l’œuvre. Les sujets religieux sont moins recherchés de nos jours. Les portraits ont plus de valeur quand on a identifié le personnage. L’identification de l’atelier de production ou du cercle valorise l’œuvre. Les toiles sont plus fragiles que les panneaux. Les détériorations et restaurations – rapiéçage ou rentoilage, dévalorise le prix du tableau. De plus le goût du moment est moins à la peinture flamande qu’à la peinture italienne. Le secteur du tableau ancien est un marché discret et spécialisé. L’achat ou la vente nécessite la plupart du temps l’intervention d’experts afin de garantir l’authenticité des œuvres et l’assurance d’une transaction réussie.